Une chaudière gaz ou une chaudière fioul émettent beaucoup de gaz à effet de serre, responsables du changement climatique. Lorsqu’on est dans une maison avec ce mode de chauffage et qu’on veut réduire son empreinte carbone, il est donc important de considérer changer sa chaudière pour un système plus performant.
Or, on ne sait pas toujours par où commencer, vers qui se tourner, ou quels sont les systèmes adaptés à son logement. Découvrez dans cet interview de Pierre-Louis, Conseiller France Renov, toutes les réponses à vos questions !
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Floraine Cordier, Coach CO2 : Bonjour, je suis Floraine Cordier auteur du blog eco-insouciance.com et coach CO2. Pour répondre au mieux aux questions que tu te poses aujourd’hui, j’ai invité un expert du sujet : Pierre Louis est conseiller France Rnov. Pierre-Louis est-ce que tu peux te présenter ?
Pierre-Louis, Conseiller France Renov : je m’appelle Pierre-Louis, je suis conseiller France Renov sur un espace France Renov du territoire national.
Il faut savoir que le service public de la rénovation France Renov est territorialisé : nous ne sommes pas des fonctionnaires mais nous sommes employés par des structures privées, généralement des associations, qui ont la délégation de ce service public.
Donc selon que vous habitiez à Rennes, à Nantes, ou à Strasbourg, vous aurez généralement un interlocuteur travaillant pour une structure différente mais toujours sous la bannière France Renov.
Un acteur neutre à contacter en premier lorsqu’on a un projet de changement de chaudière
F.C. : Alors parmi les gens qui nous regardent, certains ont peut-être un projet plus ou moins abouti de rénovation de leur logement ou de changement de leur système de chauffage. Quelle est la première démarche que tu nous recommandes quand on veut changer sa chaudière ? Est-ce que on appelle son fournisseur d’énergie ? Est-ce qu’on va voir l’artisan du coin, par quoi on commence ?
P.L.M. : On commence par aller sur le site France Renov ! Dessus, vous trouvez votre conseiller France Renov le plus proche de chez vous en entrant votre votre code postal. Cela vous permettra d’avoir un avis neutre.
Si vous voulez, on se pose en premier lieu en tiers de confiance : on va être un interlocuteur qui n’a aucun intérêt à vous vendre une solution plutôt qu’un autre, à la différence d’un chauffagiste qui va plutôt poser, par exemple, des chaudières gaz ou des pompes à chaleur, et vous orienter vers une solution plutôt qu’une autre.
Donc l’idée c’est vraiment de prendre ce premier contact de manière à avoir une personne qui va vous suivre tout au long du projet et vous amener des conseils dans votre intérêt et non pas dans le sien : parce que nous n’avons aucun intérêt commercial.
Finalement, nous ne faisons pas payer les prestations, c’est de l’argent public qui nous rémunère.
Toujours commencer par se poser la question de l’isolation.
F.C. : voilà maintenant on sait où démarrer pour changer sa chaudière ! Alors pour travailler sur un cas concret, mais qui concerne quand même un certain nombre de personnes, je te contacte aussi pour mon cas personnel. Avant, j’étais dans un appartement chauffé à l’électricité et je viens de déménager dans une maison, donc un peu plus grande, et qui est chauffée au gaz.
J’ai fait le simulateur d’empreinte carbone de l’ADEME, Nos Gestes Climat, et évidemment je me retrouve avec un bilan carbone qui a vraiment beaucoup augmenté, et qui est très fort sur ce poste du logement à cause de ce chauffage au gaz.
Alors je précise que j’ai également une cheminée à foyer ouvert donc c’est vraiment un truc un peu « décoration », je pense qu’il n’est pas très performant.
J’aimerais remplacer tout ça par quelque chose de performant qui émette peu de CO2. En fait il y a beaucoup de solutions donc est-ce que tu peux m’aider à y voir plus clair, Pierre-Louis ?
P.L.M. : oui. Il faut savoir que la partie chauffage pèse en moyenne à peu près 75% de la facture énergétique d’un foyer français. C’est vraiment La grosse dépense.
Par ailleurs, si on regarde d’un point de vue de carbone, effectivement le recours à des énergies fossiles qui vont être le fioul, le gaz, sont forcément beaucoup plus émetteurs de CO2 que les sources d’énergie se basant sur un apport électrique qui en France est relativement décarbonée.
On va donc travailler en priorité sur ce poste de chauffage et puis on aura une deuxième marge de manœuvre qui sera la partie eau chaude sanitaire, qui dans votre cas va être liée puisqu’on a généralement un équipement, quand on parle d’une chaudière gaz, qui produit les deux.
Alors il y a deux manières d’aborder le sujet mais nous, ce qu’on conseille toujours avant de partir bille en tête sur une solution de chauffage, c’est de retravailler si besoin l’isolation de la maison, et ça c’est vraiment important. C’est quelque chose qui va être durable dans le temps et qui va permettre de réduire significativement les déperditions de la maison.
Il faut savoir que la seule raison d’être d’un système de chauffage c’est d’amener une quantité d’énergie à la maison pour lutter justement contre les déperditions, et de maintenir un environnement confortable à 19-20 degrés. En isolant, on va réduire très fortement les déperditions et on va donc réduire le besoin en énergie pour maintenir à une température de confort. C’est vraiment la première étape.
Il se trouve que sur le parc français, beaucoup de maisons sont très insuffisamment isolées, ça va valoir grosso modo sur toutes les maisons datant d’avant les années 2004, où on commence à avoir une réglementation thermique très contraignante et du coup avec des niveaux de performance élevées.
Toutes les maisons antérieures ont généralement soit peu d’isolation si on est dans des maisons d’avant 74 (les chocs pétroliers), soit un niveau d’isolation faible et par ailleurs vieillissant puisqu’on se retrouve sur des maisons dont l’isolation a été faite il y a une quarantaine d’années et dont les performances baissent au fil du temps.
Donc l’isolation c’est vraiment le premier point à travailler, et puis par la suite ça va nous permettre finalement de mettre un système de chauffage moins puissant, donc moins cher, moins énergivore, et qui réponde aux besoins.
Quel système de chauffage pour remplacer sa chaudière ?
Alors dans ton dans ton cas de figure particulier, j’imagine que tu as un système de chauffage central avec des radiateurs hydrauliques ?
F.C. : c’est un plancher chauffant en fait
P.L.M. : en général, on a deux cas de figure. Soit un plancher chauffant hydraulique, soit des radiateurs hydrauliques.
Alors le plancher chauffant c’est génial, parce que l’eau qui circule dedans va circuler à plus basse température et ça va nous permettre de mettre un plus large panel de système plus efficace par ailleurs. Un plancher chauffant, niveau confort, c’est vraiment l’optimal, c’est ce qui se fait le mieux niveau confort.
Donc on va chercher à récupérer ce plancher chauffant [ou les radiateurs hydrauliques] et il va nous falloir un système qui puisse faire la même chose que notre chaudière gaz, c’est-à-dire produire de l’eau de chauffage qui va circuler grosso modo à 35 degrés dans notre plancher chauffant.
De tels systèmes, il va en exister grosso modo 4 ou 5. Certains vont être plus intéressants que d’autres.
On va avoir premièrement les chaudières gaz et les chaudières fiouls, mais ça, ça ne va pas répondre à notre problématique d’empreinte carbone. Par ailleurs, les chaudières au fioul sont interdites depuis peu à l’installation. On va éliminer ces deux solutions.
On va avoir des chaudières électriques à résistance électrique : on ne va très certainement pas aller là-dessus, parce qu’on est sur un équipement très énergivore, très peu performant, et là les factures risquent de flamber.
Les PAC (pompes à chaleur)
P.L.M. Il va nous rester trois solutions, grosso modo, qui vont être pertinentes : la première c’est la plus commune et la plus utilisée c’est la pompe à chaleur air-eau.
Ça, c’est un système thermodynamique avec une unité extérieure qui va capter des calories dans l’air. Ces calories vont être amenées jusqu’à une unité intérieure qui va se brancher en lieu et place de la chaudière, généralement, et ensuite être retransmises au réseau hydraulique, donc dans le plancher chauffant [ou les radiateurs hydrauliques].
C’est une solution très efficace d’un point de vue énergétique avec un rendement très très élevé, ce qui fait qu’au coût d’utilisation, généralement aujourd’hui on est 40% moins cher que le que le gaz au coût de l’énergie actuel. Et par ailleurs, du fait de l’utilisation de l’électricité, on répond à la problématique de la décarbonation (en France en tout cas).
Les chaudières à granulé de bois
P.L.M. Deuxième possibilité dans cette configuration, ça va être les chaudières à granulés de bois. D’un point de vue carbone, puisque c’est ça l’objet de la chaîne MaCoachCO2, on considère que le bois est une énergie neutre en carbone étant donné que ce qu’on brûle libère du carbone mais qu’il est accumulé par le bois sur un cycle de vie relativement court. Si tenté que la forêt est gérée de manière durable, c’est à dire qu’on replante les arbres, normalement on a une neutralité sur sur un temps court.
D’un point de vue utilisation c’est un petit peu le même principe qu’une chaudière gaz c’est-à-dire qu’on va brûler un combustible, cette fois-ci c’est du granulé de bois, et ça va nous permettre de chauffer notre réseau d’eau.
Alors ces chaudière elles vont poser en revanche un petit peu plus de complexité technique. Elles sont généralement relativement plus chères que les pompes à chaleur air-eau et par ailleurs on va avoir besoin d’une grande capacité de stockage à proximité et en intérieur puisque le granulé de bois n’aime pas l’humidité, ce qui va nécessiter des configurations un petit peu particulières de la maison.
On va avoir besoin donc d’un silo textile qui peut généralement faire de même par 2 mètres par 2 m donc c’est chose d’assez volumineux.
Alors c’était une solution qui était économiquement intéressante pour les gros consommateurs d’énergie dans le sens où le granulé de bois était l’énergie la moins chère du marché quasiment il y a encore un an. Il y a une quasiment une augmentation par 2 du prix du granulé sur l’année écoulée, étant donné qu’il y a beaucoup de personnes qui ont installé des systèmes granulés, des poêles notamment, et que l’offre n’a pas suivi la demande.
C’est quelque chose qui va vraisemblablement tendre à se résorber dans le futur mais aujourd’hui très clairement à l’instant t, installer une chaudière à granulés de bois c’est plus cher à l’achat et plus cher à l’utilisation.
L’avantage de la chaudière à granulé de bois par rapport à la pompe à chaleur
P.L.M. : Le gros avantage par rapport à la pompe à chaleur air-eau, c’est que la pompe à chaleur a un rendement qui va varier en fonction de la température extérieure et il va varier à la baisse. En clair, quand il fait très froid dehors, il y a moins de calories présentes dans le milieu environnant dans l’air, et donc plus de difficultés à les transférer à notre réseau d’eau.
Il y a donc un rendement qui va chuter, donc en zone montagneuse par exemple si on se situe en Savoie ou dans le Jura, où on a des températures très négatives en hiver, la pompe à chaleur air-eau peut afficher certaines limites.
Dans ces cas-là, ça peut être intéressant dans les zones montagneuses notamment d’utiliser un système granulé de bois dont le rendement ne varie pas du tout selon les conditions extérieures.
Le système solaire thermique combiné
P.L.M. : Dernier système, le plus joli et le plus écologique, c’est le système solaire combiné. Là on parle de capteurs solaires thermiques, donc ça va être finalement des capteurs dans lequel va circuler un fluide, en l’occurrence de l’eau glycolée.
Dans le capteur en utilisant les rayonnement solaire et l’effet de serre dans le panneau, on va réchauffer ce fluide et ensuite ce fluide va venir transférer les calories récupérées en toiture dans un gros ballon, généralement, et c’est ensuite cette eau qui va circuler dans notre réseau.
Ça, ça va très très bien marcher pour les solutions basse température, donc avec un plancher chauffant. En revanche, ça ne sera pas une solution qui sera satisfaisante pour des radiateurs hydrauliques où là on va avoir besoin d’une eau à plus haute température.
C’est un système qui est très intéressant d’un point de vue énergétique. Là on va avoir une très très bonne performance puisque c’est le soleil qui chauffe directement notre eau. Il y a toujours un point effectivement pour les jours où on n’aurait pas suffisamment d’ensoleillement pour amener l’eau à température, mais on va pouvoir réduire très très significativement la facture énergétique.
L’appoint est réalisé généralement par une résistance électrique plongée dans le ballon. Il peut y avoir d’autres solutions, on pourrait avoir une un appoint réalisé par exemple avec une pompe à chaleur air-eau de la même manière, mais là ça veut dire investir deux fois dans des systèmes, et là ça fait un système qui est pour le coup très cher.
Tout ça peut se calculer, quelle est la quantité de kilowattheure qui est générée par la pointe et s’il y a un intérêt ou pas, mais généralement pour des particuliers il y aura pas nécessairement d’intérêt, économique en tout cas, à faire un appoint pompe à chaleur plutôt que plutôt que résistance.
Le solaire combiné ça peut marcher à peu près partout, ça sera plus efficace dans les zones de meilleur ensoleillement donc le pourtour méditerranéen est très favorisé mais on peut en trouver jusqu’en Bretagne. Il n’y a pas trop de restrictions géographiques.
Dans ce cas là, on va éventuellement adapter un petit peu le nombre de capteurs pour mettre un petit peu plus selon la zone géographique.
Alors ça nécessite pour le coup d’avoir une toiture plutôt bien exposée, on va généralement chercher une exposition sud et une inclinaison à peu près de l’ordre de 45 degrés pour capter le plus possible le rayonnement en hiver.
Ce qui va être déterminant c’est qu’il va vous falloir grosso modo un capteur par 10 mètres carrés de surface à chauffer, soit à peu près 1 m² de de capteurs par 10 mètres carrés de surface.
C’est une solution qui peut aussi se mettre au sol si tenté qu’on n’ait pas de végétation qui nous fasse des ombres et des masques solaires.
Produire de l’eau chaude sanitaire
En hiver ces trois solutions permettent aussi de faire de l’eau chaude sanitaire et donc de répondre à la question minoritaire qui va être cette question de la production de l’eau chaude sanitaire. Il faut le prévoir, c’est pas automatique, mais les trois solutions sont capables de faire ça et généralement par contre ça se fera par accumulation.
Actuellement l’eau chaude sanitaire va être plutôt faite en direct par la chaudière gaz sans ballon. Pour ce qui est de ces trois solutions il va falloir une accumulation (un ballon d’eau chaude).
Cas spécifique du remplacement d’une chaudière au fioul.
F.C. : Pour les particuliers qui ont besoin de changer leur chauffage au fioul, qu’est-ce que tu peux leur recommander ?
P.L.M. : on va être généralement être un petit peu sur le même cas de figure que toi à la différence près que les maisons chauffées au fioul ne sont généralement pas connectées au gaz de ville, donc dans un cadre un petit peu plus rural, plus éloignées de ce réseau-là et donc eux ils ont la nécessité d’avoir un stockage de fuel sous la forme d’une cuve à fioul.
Par ailleurs généralement ces maisons sont pas équipées d’un plancher chauffant, elles sont plutôt équipées de radiateurs hydrauliques et on va avoir une eau qui va circuler généralement entre 60 et 80 degrés.
Ça va d’office nous éliminer certaines des solutions précédemment citées, notamment le solaire thermique : on ne pourra pas pertinemment installer un solaire thermique sur de l’eau de l’eau de chauffage à plus de 60°C, ça n’aurait aucun sens.
En revanche la réponse à la question va être plus ou moins la même que pour la solution gaz, c’est à dire que si possible on va récupérer le réseau hydraulique. On va commencer par nettoyer au maximum le réseau hydraulique en faisant une purge, ce qu’on appelle un désembouage de cette installation.
Ensuite, on va pouvoir y greffer soit une pompe à chaleur air eau qui va fonctionner à moyenne/haute température aux alentours de 55-60 degrés, soit une chaudière à granulés de bois. Ça va être les deux solutions principales.
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